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Ah qu’elle est belle la jeunesse !

Ah qu’elle est belle l’inconscience de la jeunesse ! devrais-je dire plutôt. Hier…

Ah qu’elle est belle l’inconscience de la jeunesse ! devrais-je dire plutôt.
Hier j’intervenais une fois encore devant un parterre d’étudiants de 4e année d’une grande école de com’.
L’objectif était de répondre à leurs interrogations concernant le marché de l’emploi pour la com’ et le marketing.

Durant 2 heures, j’ai voulu les informer, les questionner, les faire réagir et mettre à profit la connaissance du marché apportée par une intervenante (oui, c’est moi) qui rencontre, chaque jour, des décideurs et des candidats dans ces métiers.
Bon, je ne vais pas me plaindre car finalement l’auditoire a été plutôt attentif et les retours positifs.

Mais, personnellement (ben oui, je donne mon avis et j’assume), la conclusion est toujours la même et elle consiste en 2 points :
– D’abord ce sont surtout les questions de salaires qui éveillent l’intérêt des étudiants (ça tombe bien, mon powerpoint détaillait les fonctions agences et entreprises avec force détails sur les rémunérations).
– Ensuite, et surtout car c’est toujours la même surprise pour moi, ces jeunes sont à des années lumière du marché du travail.
C’est-à-dire qu’ils ne se projettent pas… Ou alors comme Planneur stratégique ou Directeur conseil. Comment ? Que dites-vous ? Pas possible en sortant de l’école ? ? ?
Un exemple édifiant : lorsque je demande s’ils imaginent combien de réponses peut recevoir une offre de Chargé de com’, profil relations presse, 2 ans d’expérience mini, 24K€, ils me répondent : 30, 10 ou zéro ! Preuve en est que ce poste ne les intéresse pas (merci j’ai bien compris). Combien grande est leur surprise quand je leur annonce que ce poste qui n’est pas assez bien pour eux reçoit sur le marché 400 réponses !

Ce qui me surprend le plus, c’est tout de même qu’ils n’ont PAS DE QUESTIONS !
Il est vrai que mon discours, très réaliste sur les enjeux économiques, le marché stagnant, les créations de postes si peu nombreuses, la frilosité des employeurs, la concurrence que représentent les chercheurs d’emploi pour des jeunes diplômés comme eux, etc. a dû leur paraître quelque peu pessimiste. Mais j’ai aussi parlé de créativité, de plaisir au travail, de motivation et de personnalité faisant la différence.

L’information transmise ne suffit pas, nous ne pouvons pas, nous, les dinosaures travaillant depuis une vingtaine d’années, faire le boulot à leur place. Il faut à ces jeunes adultes qui ont choisi le métier de la com’ une qualité essentielle que je n’ai pas vue hier et qui s’appelle la curiosité !

Allez, on se secoue, le mot de la fin était : « Ce n’est pas le diplôme qui est synonyme d’emploi, c’est vous ! »

12 commentaires sur “Ah qu’elle est belle la jeunesse !”

Guillaume Goumat dit :

Article très intéressant compte tenu du fait que je suis issu d’un Master en Sciences de l’information & de la communication et que je me rends compte chaque jour de la difficulté de trouver un emploi dans cette branche. Personnellement je n’ai jamais "craché" sur le métier de chargé de communication, c’est d’ailleurs ce genre de poste que je recherche (comme 400 autres personnes si j’en crois l’article!), par contre je dois avouer que lorsque j’étais à la Fac j’étais bien loin de la réalité du marché du travail, en ça je me reconnais bien dans votre auditoire.
Des prétentions salariales élevées ne sont pas de mon ressort, c’est d’ailleurs bien que vous rappeliez la notion de "plaisir au travail", c’est un lieu commun que de dire que l’argent ne fait pas le bonheur (mais c’est bien d’en avoir suffisamment pour vivre) et que de bonnes conditions de travail prévalent.
Après 2 ans en tant que chargé de communication pour un centre musical rural (en CAE au smic), je pensais trouver plus facilement qu’en sortant de l’école, cependant il semblerait que les rangs des candidats se sont bien remplis entre temps ce qui rend la situation difficile.
Depuis 10 mois que je suis au chômage, j’ai choisi de rendre service socialement en travaillant bénévolement avec des handicapés, je me rends compte chaque jour du bénéfice que pourrait apporter à l’association (ADAPEI) une bonne communication, des flyers, tracts et autres…cependant tout action est bénévole alors que selon moi la création de poste dans ce genre de milieu serait nécessaire et de plus beaucoup plus utile pour la société que des campagnes de communication pour des produits de consommation (je caricature désolé).
Voilà tout, votre article m’a intéressé et je me rends compte que mon commentaire risque de dépasser la longueur de celui-ci si je m’épanche trop.

Cordialement,

Guillaume Goumat

Christelle dit :

Je me permets de réagir à votre billet suite à votre intervention face à ce parterre de jeunes étudiants. En effet, je me revois quelques années en arrière, au sortir de l’université, remplie d’espoir, d’ambition et un tantinet naïve, je l’admets ! A la recherche de mon premier « vrai job », je m’adresse à l’ANPE en toute confiance. Et là, mon interlocutrice me lance une phrase qui m’assomme et résonne encore à mon oreille :

« Mais mademoiselle, des personnes comme vous, il y en a des milliers sur le marché! »

Inutile de vous dire que sans être insouciante, j’ai eu l’impression qu’une énorme faille s’ouvrait sous mes pieds. Il m’a fallu passer par l’expérience pour comprendre.

Aussi, même s’il est vrai que certains enseignants ont une fâcheuse tendance à entretenir les rêves de cette jeunesse trop éloignée des réalités professionnelles, admettons qu’ils ont l’honnêteté de faire appel à des « dinosaures » pour (r)éveiller les esprits. Même s’il est vrai que des jeunes gens repoussent le moment d’entrer dans le monde du travail, admettons qu’il est parfois rafraîchissant pour nous, vieux routards, de croiser dans les rues, des groupes d’étudiants encore enthousiastes, dont les sourires affichés en disent long sur le bouillonnement qui les anime.

Selon moi, c’est cette vitalité et cette lumière intérieure qui font aussi la force des actifs de demain. Puiser dans ces ressources personnelles dans les moments de crise, permet également de faire la différence et de continuer à chercher le meilleur chemin pour atteindre ses objectifs professionnels, même ceux teintés d’illusions.

Une réplique du film « Instinct » m’a beaucoup touchée. Dans une scène tendue à l’extrême, Anthony Hopkins demande à un jeune loup chargé de faire son expertise psychiatrique « et vous, qu’avez-vous perdu ? ». Après de nombreuses réponses infructueuses formulées par cet expert, en position inhabituelle de faiblesse et sous la menace, la bonne et seule réponse attendue qui apaise les tensions est « mes illusions ». J’ai trouvé ce moment tragique !

Enfin, et pour finir, n’avons-nous pas (presque) tous ressenti, ce 5 novembre, cette vague de « Yes we can » venue d’un autre continent. Insouciance, illusion, réalité ? Il sera toujours temps d’être inquiet. « Carpe diem* »

* La formule latine complète d’Horace est : « Carpe diem quam minimum credula postero » traduite par « Cueille le jour [et sois] la moins curieuse [possible] de l’avenir.»

Le débat reste ouvert 🙂

Dominique dit :

Ah vous êtes dure. Facile quand on a de l’expérience.

patrick dit :

Je suis chef d’entreprise et j’ai l’impression de me lire. C’est vrai que c’est difficile de comprendre ces jeunes qui pensent que tout leur est dû… sous prétexte qu’ils sont… jeunes ! En tout cas, c’est courageux de votre part de tenir ce discours, qui va certainement déplaire à vos candidats. Mais je crois qu’il est utile de leur donner une juste vision du marché du travail. C’est pour leur bien.

Antonia Savey dit :

Tu avais raison Claire, la lecture de ton billet me conforte. Ce Master pas encore tenu pour acquis, je préfère mille fois le convoiter dans le désordre à 43 ans versus tes étudiants presque atones de curiosité alors qu’ils devraient avoir les yeux qui pétillent d’envie. Z’ont peut être pas assez faim nos jeunots. Va savoir !
Concernant mes brebis de 3ème année, ce qui est fou c’est qu’ils utilisent les NTIC encore comme des ados avec leur skyblog et ne réalisent même pas que cet outil fabuleux avec lequel ils sont nés et également le support et le vecteur le plus riche et efficace de leur futur vie professionnelle. Le réseau social, pas entendu parlé ! Ah vraiment je te jure, c’est rassurant, on a du boulot et des trucs en pagaille à leur transmettre, nous autres dinosaures ! Je te remercie.
PS : Me plait bien le ton très Claire Romanet de cette dernière note, faudrait que ca dure.

jcmorand dit :

Je leur pardonne ! Les profs (non issus de l’entreprise) ont souvent tendance à faire passer un message qui laisse penser aux étudiants qu’ils sont les meilleurs du marché, l’élite de la nation.. ne sont-ils pas dans une "grande école de com" ? Alors a force de leur donner la grosse tête, ils y croient. J’enseigne actuelllement aprés une carrière en entreprise et il est vrai que l’équillibre est difficile à trouver entre le stimuli de l’ambition et l’autosatisfaction. Ce matin encore, un étudiant m’écrivait pour me demander la justification d’une note (à la moyenne) surpris qu’il était de ne pas avoir plus.. un peu comme les espoirs de salaires à la sortie…
A leur décharge aussi, quand on découvre les revenus des PDG du CAC 40 cela suscite l’envie de combler le gap.

Anne dit :

Je suis tout à fait d’accord avec vous, mais la faute à qui en fin de compte? Je suis sortie d’école avec des étoiles pleins les yeux et des projets qui me semblaient très accessibles, voire facile. Que dure fut le contact avec la réalité!! C’est d’autant plus important que des personnes telles que vous leur parle de ce qui les attend et qu’ils sortent de leur bulle. On nous donne des cartes, à nous de faire une bonne partie !!!

Bravo Anne. C’est exactement ça, à vous de faire une bonne partie avec les cartes qu’on vous donne… et celles que vous allez avoir par vous-même. C’est cet état d’esprit qu’on aimerait pouvoir transmettre.

masmaprtous dit :

Facile à dire et critique facile à faire lorsqu’on a déjà un job. Comment en vouloir à des jeunes qui s’intéressent avant tout à bien gagner leur vie ?

Aucun ressentiment vis à vis de ces jeunes qui n’ont plus envie de changer le monde, juste de la déception.
Je crois que la réponse de Christelle ci-dessus exprime bien cette distance entre la vision qu’ils peuvent avoir du monde du travail et la réalité, une fois qu’ils y sont.
Le salaire n’est certainement pas une fin en soi, on ne se réalise que dans un job qu’on aime. C’est tout de même, après le temps qu’on passe à dormir, le temps le plus important de nos maigres existences !

Sylvain dit :

"on ne se réalise que dans un job qu’on aime"
C’est pour cela que quand on pense l’avoir trouver, il faut s’accrocher pour l’obtenir et redoubler de motivation, car pour un jeune diplômé, l’arrivé dans le monde du travail est souvent une chute vertigineuse du piedestale sur lequel on a été mis durant nos études.

Toutefois je ne perds pas espoir, j’ambitionne de touver, un jour, un job enrichissant non pas mon porte monnaie, mais mon vécu, mon expérience et me permettant de m’épanouir un peu plus chaque jour (ensuite viendra peut être le porte monnaie) ;-). Mais avant tout, c’est à moi de me donner les moyens d’y arriver!!!

Julietta dit :

Bravo pour cette juste analyse… Moi j’aimerai ajouter, pour en avoir un modèle vivant pas très loin, dans le biotope familial, que ce décalage et ce manque d’entrain ne touche malheureusement pas que les grandes écoles de comm’… Un peu comme si en dehors de certains sacerdoces tels que la médecine, par exemple, nos jeunes étudiants auraient un peu tendance à se comporter comme des opportunistes sur le marché de l’emploi…. Or, pas de place à l’opportunisme ! Projetez-vous, ayiez envie d’être plutôt que de faire… vous verrez… On y voit plus clair finalement…

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