Des crânes à s’en faire tourner la tête

Avec les succès des expositions de 2005 et 2013, la Fondation Cartier accueille à nouveau l’artiste australien Ron Mueck, célèbre pour ses œuvres hyperréalistes et étranges (dont nous vous avions déjà parlé pour l’expo « Ceci n’est pas un corps » qui nous avait grandement impressionnés).

Des crânes hyperréalistes mais… géants

En ce moment et jusqu’au 5 novembre 2023, Ron Mueck vous sidère avec ses pièces XXL : 100 crânes, bébé et chiens géants. L’amoncellement de ces crânes tout blanc (1,50 m de hauteur), présenté en pyramide surtout, est une œuvre forte qui questionne et qui dérange. On est loin des vanités du 17e siècle et cet effet pyramidal renvoie à d’autres faits historiques, lointains ou en cours. On pense aux charniers et autres tueries de masse bien sûr, mais aussi aux catacombes (tout près de la fondation Cartier). Le titre de l’expo « Mass » pouvant se traduire à la fois comme « masse, amas, tas » et comme « messe ».

Pour l’artiste, « le crâne humain est un objet complexe, une icône puissante, graphique, que l’on identifie immédiatement. Familier et étrange à la fois, il rebute autant qu’il intrigue. Il est impossible à ignorer, accaparant inconsciemment notre attention ».

Une impressionnante et parfaite technique

Le résultat aussi précis que réaliste (avec la disproportion les détails sont encore plus visibles) nécessite une technique bien particulière. On voit bien que les crânes sont réalisés à partir de moules (c’est la volonté de l’artiste), d’abord en argile, puis en résine. De fait, Ron Mueck (qui travaille seul, contrairement à d’autres célébrités entourées de dizaines d’assistants) utilise des matériaux variés (carton, cire, argile, résine, peintures…), tout ce que l’ordinateur et l’impression 3D peuvent lui apporter, et enfin des colles et silicones « qui viennent juste d’être inventées ». Peut-être un clin d’oeil avec le métier de marionnettiste que l’artiste a exercé pour le Muppet Show ?
Adepte du travail extrêmement rigoureux – et donc lent – il a fallu un an pour que le premier moule de crâne satisfasse Ron Mueck. Et une autre année pour décliner les 99 autres.

L’artiste, qui n’a pourtant réalisé que 48 pièces (et quasiment tout vendu) en 26 ans de carrière, propose une réflexion sur ce que nous sommes en tant qu’êtres humains à travers un bouleversement des rapports d’échelle. Bref, sur ce qu’est la condition humaine.
A voir à la Fondation Cartier jusqu’au 5 novembre prochain.