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Recrutement dans le marketing digital : bilan 2014 et perspectives 2015

Conclusion et prospective. Interview de Claire Romanet pour Jobmarketingvente.com.

Quel bilan 2014 faites-vous concernant les recrutements dans le marketing digital ?

2014 a été une année particulièrement soutenue car les mutations qu’engendrent le digital dans nos usages personnels et professionnels impactent fortement les métiers du marketing. Avec mon rôle de chasseuse de têtes spécialisée dans ces métiers, je vois 3 raisons essentielles pour expliquer les fortes demandes en recrutement dans le marketing digital :

Tout d’abord la relation avec le client final n’a jamais été aussi importante (un changement qu’on aime chez Elaee comparer à celui des grands magasins du « bonheur des dames » d’Emile Zola ;-)). Le besoin du consommateur de savoir, connaître, comparer, noter, juger… ne peut plus être mis de côté. Il a la parole, le fait savoir et exige une réponse. Du coup, le marketing doit tendre vers une excellence relationnelle qui a pour conséquences de la formation en interne mais aussi du recrutement de forces vives.

2. Dans le même temps, les progrès technologiques (surtout ce qui concerne big data, mobilité, et multi-écrans) ont clairement complexifié les missions attribuées aux postes en marketing. Même si cela n’en est que plus passionnant, c’est un vrai défi. Une des réponses est l’intégration de nouveaux collaborateurs aux profils plus techniques.
3. Enfin, les entreprises (les grands groupes internationaux d’abord, les moins importantes ensuite, les ETI bientôt) mettent en œuvre la fameuse « transformation digitale » dont tout le monde parle. Et c’est au marketing (parfois à la communication ou aux ressources humaines) qu’on demande de gérer cette digitalisation.

Les offres d’emploi en marketing sont donc clairement poussées par le digital. Je voudrais d’ailleurs ajouter qu’il n’est plus possible aujourd’hui que les candidats « boudent » le numérique. La question n’est plus de savoir si on se positionne comme « web » ou « pas web » : le digital fait partie intégrante de la fonction marketing.

Le marketing digital fait donc partie des secteurs privilégiés où de nombreux postes sont à pourvoir et sont créés.

Quels ont été les secteurs d’activité qui ont le plus recrutés ?

En France, le secteur des services (comprenez les services divers aux entreprises, pas seulement les services à la personne) est toujours prépondérant sur les autres tels que l’industrie, le commerce ou la construction.

Certaines filières, comme la santé, la finance / banque / assurances, sont toujours actives autant qu’attractives, parce qu’elles ont de nouveaux challenges à réussir. Prenons l’exemple de la santé, qui est assez révélateur. Il regroupe des enjeux sur la télémédecine, la connaissance des patients, le traitement de leurs données, la création de nouveaux services, l’achat de médicaments sans ordonnance en ligne, l’émergence des outils connectés, avec de fortes contraintes (sécurisation des données personnelles, réglementaire, etc.)… Tout cela entraîne des mutations fortes dans les organisations, la façon de vendre et bien sûr sur de nouvelles répartitions de tâches, de missions, et donc de nouveaux recrutements.

Le numérique en lui-même reste un secteur extrêmement évolutif, même si on ne sait toujours pas exactement en quoi il consiste puisqu’il mêle les fonctions informatiques, e-commerce, web, etc. Toujours est-il que l’Insee annonce que 1,5 millions d’emplois concernent le digital.

D’autres secteurs, comme les médias (la presse notamment) ou la culture continuent de faire rêver les candidats alors qu’il y a, finalement, peu d’élus.

Reste que les métiers (si peu valorisés en France) de la vente ont toujours la première place puisqu’ils représentent à eux seuls 14% de l’ensemble des offres publiées au 3e trimestre 2014 (étude Jobfeed – octobre 2014).

En 2014 chez Elaee, on a nettement vu les définitions de profils évoluer vers plus de dimension commerciale et de connaissance du client. Tous secteurs d’activités confondus.

Quelles ont été les fonctions les plus recherchées ? 

Pour cette année qui vient de se terminer, la demande en postes à pourvoir en marketing s’est clairement affirmée sur 3 axes.
1. Les réseaux sociaux, qui ne concernent pas seulement la fonction de Community manager. Aujourd’hui, la gestion des communautés étant un enjeu majeur pour les marques, on professionnalise de plus en plus la fiche de poste et le social media dorénavant regroupe une douzaine de métiers différents : CM, curator, architect builder, architecte de l’information, chargé de veille, social media strategist, growth hacker, etc.

2. Le contenu. L’éditorial est déjà extrêmement présent dans les définitions de postes à recruter mais avez-vous bien noté que le content management ne concerne plus seulement le texte ? Dorénavant, la vidéo, l’infographie, le design (et là on rejoint les métiers liés à l’UX design, c’est-à-dire la conception d’un site web ou mobile afin que l’expérience utilisateur soit la meilleure possible)… prennent le pouvoir. Vous voulez un exemple ? Twitter développant son propre lecteur vidéo en concurrence de Youtube est un signe fort.

Les fonctions cumulant conception, rédaction, diffusion ont donc de beaux jours devant elles.

3. La data, annoncée comme « la bataille de demain » (déjà en marche) au vu de la fameuse injonction « l’information c’est le pouvoir » si chère à nos GAFA, crée elle aussi des fonctions qui sont recherchées. L’acquisition des données, leur exploitation, la connaissance du client final, sont autant d’enjeux stratégiques. Tout le monde parle du fameux poste de Data scientist : certains en ont déjà le titre, peu ont le profil de ceux de Californie qui, avec moins de 3 ans d’expérience, touchent 100 000 dollars / an. Attention, les compétences attendues sur cette fonction sont complexes car elles cumulent statistiques, informatique et… marketing.

Ces 3 axes principaux, qui vont encore se développer, sont suivis de très près par d’autres besoins.  Certains sont déjà connus comme l’acquisition de trafic ou la recherche de leads via tous les leviers mis à notre disposition (SEO, SEM, affiliation, retargeting, etc.). D’autres sont bien plus récents, liés par exemple à l’évolution des technos (comme le mobile ou le cloud,) ou à d’autres façons de travailler (comme le RTB ou le digital labor).

En tout cas, tous ces axes nous promettent de nouvelles créations de postes… et de métiers.

Avez-vous constaté l’émergence de nouvelles fonctions ?

L’accélération du temps que l’on subit au quotidien (comme le décrit si bien Harmut Rosa) fait qu’on travaille de plus en plus à court-terme. Tout va tellement vite qu’on demande aux cabinets de recrutement comme Elaee de rechercher des fonctions qui n’existaient pas il y a 2 ans.

Les intitulés de postes changent (par exemple, les webmasters sont souvent devenus des chefs de projets digitaux ou bien certains DA web se sont transformés en UX designers… La sémantique est importante en marketing n’est-ce pas ?) mais les fonctions elles-mêmes changent aussi. D’abord sur les expertises : pour un poste de CM par exemple, on peut dénombrer dorénavant 6 ou 7 postes différents, toujours dans le community management, mais chacun avec une expertise plus pointue.

On voit apparaître aussi des échelons intermédiaires (managers encadrant des équipes là où il n’y avait qu’une seule personne il y a 3 ans) ou même des Chief Digital Officer dont une des missions concerne le marketing digital (mais pas seulement) qui sont le plus souvent membres du Comité de direction.

Une autre tendance forte du moment concerne le tout nouveau poste de Responsable de la transformation digitale, qui tient souvent un rôle de formateur et d’évangéliste web auprès des salariés de l’entreprise.

On voit en tout cas de plus en plus de postes initiés par le digital.


Quels ont été les profils les plus recherchés ? Et les plus difficiles à recruter ?

Chez Elaee comme au sein des autres cabinets de recrutement, les demandes les plus importantes (et les plus difficiles à recruter) sont celles où l’expérience attendue est pointue. Et multiple.

Chaque métier est en constante mutation et demande une remise en question permanente du salarié. Il lui faut donc apprendre constamment, et son niveau de qualification augmente, souvent en se spécialisant dans un domaine plus qu’un autre. C’est d’autant plus vrai dans le marketing digital qui voit émerger chaque jour de nouveaux outils ou de nouvelles façons de travailler comme celles citées plus haut.

On nous demande donc souvent à la fois une compétence marketing (de plus en plus poussée) en même temps qu’une expertise dans un domaine précis. Pour vous donner un exemple : pour l’animation d’une plateforme e-commerce, on va nous demander de recruter un professionnel aguerri sur la gestion de projets et l’encadrement d’équipes techniques et créatives, qui possède en même temps et en plus, la connaissance du produit / marché / service vendu sur le site.

Ce qui reste difficile aussi, c’est la dimension humaine du recrutement car il est clair que la méfiance entre les salariés et les employeurs ne fait que grandir, et cela dans les deux sens malheureusement.

Votre stratégie pour recruter ces profils a t’elle évolué ? 

Elaee fait partie des premiers recruteurs nouvelle génération : nous nous appuyons sur les réseaux sociaux depuis 8 ans. Nous utilisons donc depuis longtemps le digital comme moyen de sourcer (trouver des cv), entrer en contact, qualifier et accompagner nos candidats.

Nous sommes aussi, depuis le début, engagés sur la transparence des échanges (candidats comme clients), les réponses obligatoires (aux candidatures comme aux commentaires), et leur suivi à long terme. Chez nous, chaque consultant a aussi une mission en communication et marketing digital (par exemple en participant au mag Elaee.com ou à l’animation de nos communautés), ce qui nous permet de bien comprendre les enjeux de nos clients et les quotidiens de nos candidats.

Les RH ont subi une profonde mutation ces dernières années, obligeant à considérer le candidat avec plus de proximité et de respect, mais aussi en faisant appel aux nouveaux outils (mails, veille, skype, linkedin, viadeo, facebook, twitter, etc.). D’ailleurs, nous formons des services RH à ces nouvelles façons de recruter.

Selon vous, quelles sont les perspectives de recrutement pour 2015 ?

Je suis optimiste pour 2015 car le marketing digital est un immense pourvoyeur d’opportunités, pour les professionnels déjà en poste certes, mais aussi pour les jeunes diplômés qui connaissent mal les métiers correspondants (et pour cause ils sont récents). Les salariés qui ne sont pas issus directement de la fonction marketing sont aussi concernés car, avec de la passion, l’envie d’apprendre, et une grosse force de travail, on a aujourd’hui de nombreuses ressources (comme Twitter, les Mooc, Cooc, Spoc ou les tutorials) pour parvenir à se faire une place dans ces métiers.

Quand on sait que 65% des écoliers d’aujourd’hui auront un métier qu’ils ne connaissent pas encore et que, sur les 10 métiers qui embaucheront demain, 8 sont dans le digital, ça fait de belles perspectives non ?

 

Jobmarketingvente.com
janvier 2015

 

3 commentaires sur “Recrutement dans le marketing digital : bilan 2014 et perspectives 2015”

MX dit :

Le digital fait partie intégrante du marketing, c’est une grande vérité. J’en veux pour preuve l’énorme plan de formation mis en oeuvre dans ma boîte… qui me stresse d’avance.

Mylène dit :

Prof de zumba dans les 10 métiers recherchés aux USA, rigolo ! Merci à Claire Romanet pour cet article fort détaillé sur les tenants et aboutissants des fonctions marketing. C’est rare qu’un recruteur soit aussi transparent et aussi documenté, alors bravo.
et bonne continuation au mag Elaee

Humournoir dit :

Oui, la sémantique est importante en marketing, c’est pour cela qu’on dit « digital » et plus du tout « web » et encore moins « net ». C’est quoi le bon terme pour demain ?

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